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Le Dauphiné Libéré - 23/10/11

La bonne recette familiale

Il a bien tenté de l'en dissuader, de lui expliquer que le métier est difficile et que les loisirs, c'est plutôt pour les clients. ""J'aurai préféré qu'il soit plombier ou électricien", explique Éric Marsella, le patron du Monte Cassino, en parlant de son fils Florian qui travaille avec lui depuis un an.
Une équipe familiale née un peu par hasard: "Quand ils étaient petits, il venait manger là à midi avec ses soeurs. Les clients fidèles les ont vus grandir mais jamais je ne les ai incités à travailler dans la restauration", raconte le chef.
Il y a 27 ans que ce Viennois de naissance a monté son affaire. Mais depuis 1984, le métier a bien changé, beaucoup de contraintes et peu de considération "Avant on m'amenait un morceau de viande, je le cuisinais sans me poser de questions. Aujourd'hui, je pèse tout pour ne rien gaspiller. On passe de restaurateur à gestionnaire. On apprend à tout compter."

"Le temps des fours à bois où l'on fabriquait la pizza près du client "
Mais pas de défaitisme pour autant. Ce métier il l'a choisi et il l'aime: "J'ai commencé dans la pâtisserie. A la fin de la troisième, je ne me voyais pas trop continuer l'école". C'est rue Marchande, chez monsieur Bégon, qu'il fait son apprentissage : "J'avais 13 ans, je faisais les courses, la plonge... C'était l'époque où l'on travaillait très jeune et au noir!"
Puis très vite, la pâte à gâteau a remplacé celle à pizza. Et comme l'homme n'aime pas la solitude, "ça ne sert à rien de rester dans son coin", il s'est entouré, réuni et a travaillé avec de nombreux autres chefs qui l'ont accompagné dans sa vie, bien loin de tout conflit: "Si j'ai fait ce métier c'est parce que j'aime le contact avec les gens. On perd assez de temps comme ça dans la vie pour s'énerver ". Il y a quelques mois, il a ainsi pris la présidence de l'amicale des restaurateurs et cafetiers viennois: "J'aime ce mot d'amicale, il veut tout dire".

Èric Marsella retourne de temps en temps en cuisine qu'il a laissée aujourd'hui à son fils Florian ce qui lui permet de s'occuper de ses multiples casquettes (membre du directoire de l'office de tourisme, président de l'amicale des restaurateurs et cafetiers de Vienne, membre du bureau de la foire de Vienne, membre du conseil d'administration de Nord-lsère gourmand et de Groupama). Photo DL/C.B.

"Jamais je ne ferai une pizza au chorizo !"
Un goût pour les autres qu'il tient probablement de ses origines méditerranéennes et de ses parents venus s installer à Vienne dans les années 50: "Il y avait beaucoup d'industries, il y avait donc du boulot ". Des parents italiens et l'idée de travailler dans une pizzeria était toute trouvée: "J'avoue j'a choisi la solution de facilité" raconte-t-il avec humour. C'est d'abord auprès de monsieur Belilty du Don Cesar qu il est engagé : C'était le temps des fours à bois où l'on fabriquait la pizza près du client ". Il apprendra à f aire tourner la pâte, de Vienne à Paris: "Le patron m'emmenait dans la capitale chez des cousins à lui pour s'inspirer o.
Aujourd'hui, le four a regagné la cuisine et Éric Marsella a créé sa propre affaire après avoir traîné sa roulotte à la sortie des bals populaires pour proposer des pizzas et tartes à emporter: "Dès que j'ai pu réunir un peu d'argent, j'ai créé mon restaurant.
S'il a réuni autour de lui ses enfants, la famille est aussi dans l'assiette : " J'aime la cuisine simple et traditionnelle. Jamais je ne ferai une pizza au chorizo!" La carte évolue, se modernise: "Les enfants ont de très bonnes idées, quelquefois je me sens dépassé".
Alors bien sûr la vie de famille au travail, ce n'est pas tous les jours parfait : " Il faut comprendre l'approche de papa patron !" Mais on sent malgré tout qu'Eric Marsella est plutôt fier d'avoir auprès de lui son fils et de temps en temps ses deux filles. "Le restaurant devient une vraie famille", conclut-il.

Clément BERTHET

BlO EXPRESS
Éric Marsella est né en 1960 (51 ans) à Vienne. Il a fait l'école primaire à République avant d'intégrer Ponsard pour le collège. Il a effectué son service militaire d'abord à Saint-Germain, puis à Estressin. Après un apprentissage dans la pâtisserie de monsieur Bégon, rue Marchande, il est ensuite embauché en 1982 à la pizzeria Don César avant de créer sa roulotte ambulante quelques mois plus tard. C'est en 1984 qu'il crée, avec son épouse, le Monte Cassino. Il travaille aujourd'hui avec son fils, Florian 20 ans, et est épaulé par ses deux filles Magali 22 ans et Marine 25 ans qui a choisi une autre voie puisqu'elle est ingénieur en informatique.

SON MEILLEUR COMPLIMENT
Le meilleur compliment qu'un client puisse faire "Quand il revient d'Italie et qu'il passe tout de suite chez nous pour retrouver les saveurs qu'il a dégustées là-bas ". En 25 ans, il a d'ailleurs su fidéliser ses clients:
" Aujourd'hui, ce sont leurs enfants ".

Coup de coeur
"J'aime tout simplement me ville. Vienne est belle, riche de patrimoine et j'ai beaucoup de plaisir à me promener. L'été pendant le jazz, le centre-ville est animé avec toutes les terrasses des restaurants. Mais il reste beaucoup de choses à faire et il faut faire bouger les mentalités. Avec notre amicale des restaurateurs et I cafetiers, nous avons mis en place de nombreuses formations pour servir au mieux les clients".

Coup de gueule
"Je trouve que notre profession est aujourd'hui dévaluée par tous les politiques et de n'importe quel bord. Je trouve que nous manquons de considération malgré nos efforts importants réalisés depuis de nombreuses années. Les gouvernements s'attaquent toujours aux restaurateurs et cafetiers alors que nous sommes une profession qui aide l'économie qu'elle soit locale ou nationale".