Une leçon d'Histoire

" La vie d'un escholier viennois (...) est rude : lever à 6 heures, messe obligatoire à 7 heures, première leçon à 8 heures. Il ne doit apporter au collège ni dague, ni épée, ni marteau. Seulement un couteau pour les repas. Il doit parler latin sous peine d'être fessé irrémissiblement."
Voilà un extrait du règlement intérieur de l'école de Vienne en 1550, avant même la création du nouveau collège autorisé par le roi Henry IV en 1604. Quatre siècle plus tard, les actuels occupants du bâtiment qui a brillamment résisté au temps en traversant les époques dont certaines ont été plus que chaotiques, célèbrent les 400 ans de leur collège. Un établissement qui porte le nom de François Ponsard depuis 1914, en hommage à ce Viennois, le plus illustre des anciens élèves puisqu'il fut un auteur dramatique dont la gloire égala presque celle de Victor Hugo vers 1845.
Pour fêter l'événement à l'aube de cet été 2004, une exposition remarquable a été réalisée. C'est là que les visiteurs découvrent avec attention les étonnants articles du règlement de 1550. Et bien d'autres choses encore. Des petits trésors historiques d'après Marcel Morabito, le nouveau Recteur d'académie qui a fait le déplacement à Vienne il y a quelques jours lors du vernissage.
- Nous sommes dans un établissement exceptionnel. C'est rarissime de travailler dans un collège conçu au début du 17ème qui a connu un nombre phénoménal de régimes politiques d'une extrême complexité et de soubresauts, avant d'aboutir à la stabilité républicaine" a-t-il indiqué, visiblement impressionné. "Vous avez entre vos mains un objet pédagogique unique. Soyez-en fiers," a-t-il insisté devant un parterre d'invités où se pressaient des anciens élèves (parmi lesquels le député-maire Jacques Remiller qui, comme des milliers d'hommes et de femmes, a usé ses fonds de culotte sur les bancs de cette école) et d'actuels collégiens, des professeurs d'hier et d'aujourd'hui, les responsables présents (dont le principal Charles Leblanc) et certains passés.
Pour beaucoup, cet événement est l'occasion de s'approprier l'histoire du lieu qu'ils fréquentent quotidiennement. Les enseignants et les élèves du 21ème siècle ont depuis le début de l'année scolaire travaillé sur des thèmes différents. C'est ainsi que lors du lancement de l'exposition, plusieurs d'entre eux étaient costumés pour figurer les époques de leurs prédécesseurs: Armand s'est glissé dans la peau d'un marquis, Mahjouba faisait revivre une charmante infirmière de la guerre de 14, Samantha incarnait un petit Mozart, Ese n'était autre que Napoléon III tandis qu'Élodie endossait l'habit de Joséphine. Un autre groupe a par exemple, travaillé sur le matériel géologique utilisé pour la construction du bâtiment.

Les 400 ans de Ponsard représentent aussi pour beaucoup un grand moment d'émotion qui leur permet de renouer avec leurs souvenirs d'enfance. Séquence nostalgie samedi soir, quand plusieurs centaines de convives dont certains comptabilisent plus de 80 printemps ont participé au repas des retrouvailles. Mais revenons à l'exposition qui constitue le plus gros morceau de la commémoration. "C'est l'occasion de redécouvrir l'histoire du collège, le plus vieux du département, l'histoire locale ainsi que les grands événements de l'histoire de France. C'est aussi un moyen pour mesurer l'évolution de l'enseignement en France à partir de ce petit collège de Province" explique Pierre Domeyne, son concepteur (lire par ailleurs ci-dessous).
C'est aussi l'opportunité de montrer au public pour la première fois, "des documents originaux qui appartiennent au patrimoine de la ville et qui étaient disséminés un peu partout," remarque ce spécialiste. Dans une vitrine, on peut admirer l'original des lettres patentes d'Henry IV autorisant la création du nouveau collège de Vienne en 1604. Le texte sur parchemin est illisible, le sceau en cire abîmé (même s'il a été restauré) mais l'objet impressionnant. Il est conservé dans une botte aux archives municipales précise Pierre Domeyne, fier de l'avoir "exhumé". Un peu plus loin, les amateurs apprécieront le dessin figurant le projet de façade signé Étienne Martelange, l'architecte des jésuites chargé de la conception du bâtiment en 1605. Ou des plans en latins prêtés par la bibliothèque nationale qui représentent l'établissement en 1707 avec sa répartition des classes de rhétorique et de logique autour de la première cour tandis que le lavoir et la boulangerie se situaient un peu plus loin et que l'église occupait l'emplacement de l'actuel centre de documentation. Ce n'est là qu'un petit aperçu du contenu de cette véritable promenade dans le passé à la fois instructive et émouvante puisque l'exposition est composée également de photos de classes, dont certaines récentes, et de plusieurs hommages à des professeurs ou chefs d'établissements.

Une assistance attentive au discours de M. le Maire, ancien élève de Ponsard.